Les petites maisons marocaines les plus modestes peuvent parfois cacher des merveilles, comme cette superbe porte, retrouvée par un Ouarzazazi dans une petite pièce de sa maison, dans la medina de , non loin de la kasbah de Taourirt.
Les deux côtés sont très richement décorés, mais de façon assez différente. Lequel était vers l’intérieur ? Sans aucun doute le plus clair, celui qui conserve encore sa fermeture traditionnelle en argent. Comme beaucoup de portes marocaines, celles-ci sont étroites, 54 centimètres pour chaque battant, et hautes, près de 1m90. Adaptées à des pièces très hautes aux rares ouvertures, le meilleur moyen de lutter contre la chaleur.
Les motifs ont admirablement bien survécu, normal, ce sont des couleurs traditionnelles.
Les détails du battant le montrent clairement :
Vert menthe, bleu indigo, jaune safran, rouge garance ou cochenille résistent au temps à partir du moment où ils sont au sec. La peinture normale a moins bien tenu, laissant voir le bois de rouge d’origine, sans doute du cèdre.
Je trouve particulièrement belle l’irrégularité légère des motifs, le traçage était fait par le Mâalem à la pointe du compas sur la porte, effacé au rabot en cas d’erreur, mais il subsistait toujours de légères différences d’un motif à l’autre.
Les fleurs indiquent peut être que la porte menait à une chambre féminine. Celle de la favorite ? Ou bien celle d’une femme qui s’occupait des enfants ? L’encadrement est basé sur l’étoile à 6 branches, le Magen ou sceau de Salomon, qui fut utilisé très longtemps au Maroc comme symbole de chance (en fait il a même figuré sur le drapeau Marocain sous plusieurs dynasties. Les Alaouites, eux, avaient un drapeau uni, et c’est sous le protectorat que l’étoile à 5 branches a été introduite, pour éviter la confusion avec d’autres drapeaux de chefs de tribu).
Au lieu de grands aplats, l’autre côté est divisé en petits motifs, décorés au pochoir. Là encore on est dans un univers floral, assez atypique par rapport aux habituelles décorations très géométriques et abstraites. La dominante est rouge et jaune, cochenille et safran, les dessins, des fleurs dans un jardin sont d’abord tracés en noir, et ensuite le remplissage est appliqué au pochoir, et ne se superpose par toujours parfaitement.
Imaginez cette porte ancienne, dans une kasbah, sans doute à l’étage, donnant sur le patio intérieur. Et la beauté de ces couleurs chaudes se mariant avec le pisé des murs, l’intérieur de la pièce devait être décoré d’une mosaïque claire, en harmonie avec les dominantes bleues et blanches du battant.
La serrure en argent se referme sur ses mystères.
Et quand je vois cette vieille porte qui est encore présente dans la casbah de Télouet, je suis frappée par les similitudes de motifs, et même dans le bois sous-jacent qui apparait.
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