Un homme est mort dans les dunes hier. Des dunes que nous avions parcourues quelques jours auparavant, émerveillés de la vivacité des petites pousses qui surgissaient au creux du sable après la pluie.
Le désert était vert, une verdure toute relative bien sûr, rien à voir avec la Normandie, plutôt une simple nuance, comme un voile de mousseline jeté sur l’erg, qu’on peine à distinguer quand on s’en approche, mais qui est là, indéniablement.
Les plantes fixent le désert. Le sable avance au Maroc comme en Maurétanie, comme partout. En quelques mois il est capable de dépasser le mur de l’Oasis, après une tempête de sable la route goudronnée entre Erfoud et Rissani ressemble à une piste saharienne. Des lignes de roseaux sont plantées, serrées, pour fixer les dunes, et les empêcher de progresser.
Il suffit d’une journée de course du Dakar pour détruire tout cela.
Bien sûr, le Dakar fait vivre (un peu) les populations locales.
Pendant 2 ou 3 jours, une quantité énorme de touristes s’abat sur une ville, l’assistance, les journalistes, les VIP vrais et faux, ceux qui suivent le Dakar, ceux qui se font offrir un aller-retour par leur entreprise, ceux qui écrivent, ceux qui photographient, etc… Ouarzazate était embouteillée hier, une vision bien surprenante de cette large avenue Mohammed V pour une fois couverte de voitures. Il fallait même faire quelques mètres pour trouver une place pour se garer. Plus un véhicule de location disponible, plus une seule chambre d’hôtel de libre.
Pour les hôteliers, pour les loueurs de voitures, et même pour certains restaurateurs, le Dakar est une bonne affaire, quelques centaines de clients à prix d’or, et hors saison. Mais pour les autres ? Le Dakar transporte sa propre infrastructure, une grande partie de son ravitaillement arrive directement d’Europe… Les hôteliers de Ouarzazate ne sont pas les nomades Aït Haddidous dont les pâturages sont partiellement détruits par la course, ni les villageois de Tazarine qui voient, certaines années, une nouvelle sorte de criquets s’installer pour une journée en laissant des pistes fragilisées, voir détruites.
Le Dakar est meurtrier. Y a-t-il eu une seule année sans un décès ? Coureur, organisateur, ou pire encore, enfant qui regarde les voitures passer et ne se pousse pas assez vite.
Le jeu en vaut-il la chandelle ? Sans doute pour ceux qui y participent. Toute mort est profondément injuste, regrettable, mais mourir instantanément, en pleine course, au moment où l’on réalise son rêve, c’est sûrement moins triste, moins injuste que de sa faire faucher par une machine sortie d’un nuage de sable, la faucheuse vrombissante moderne, aussi incompréhensible pour ces gamins des douars que pouvaient l’être les premiers trains pour nos paysans du siècle dernier (en fait de l’avant-dernier siècle, j’ai un peu tendance à oublier que nous sommes maintenant au XXI°).
Le Dakar a été une aventure, il a été la possibilité d’une belle course ouverte aux anonymes comme aux grands, il a été l’immersion dans des paysages superbes, difficiles, grandioses. Il a perdu tout cela, devenu une énorme organisation, une machine à brasser de l’argent. Il n’a jamais, au grand jamais, été la découverte du désert.
Le désert, c’est la solitude, les paysages répétés à l’infini, le temps qui passe sans que rien ne bouge, d’autre que les pieds du nomade qui chemine de concert avec son dromadaire. Il est l’usure du temps et du rien, le soleil qui brûle, le sel qui brûle, le froid de la nuit, le dessèchement des lèvres, et la fatigue de l’œil ébloui par les reflets sur les pierres noires. Il est le silence, où l’on perçoit peu à peu les déplacement minuscules des insectes, l’écho lointain, faible comme un rêve des musiques de l’oasis, la chute subite d’un peu de sable sous le pas d’un oiseau.
Comment découvrir le désert quand on fait en une journée ce qui prenait plus d’une semaine aux nomades ? Comment voir vraiment les paysages, au milieu des nuages de sables des voitures, des camions ? Comment sentir la chaleur emmitouflé dans les combinaisons protectrices et le casque ? Comment entendre le glissement furtif du serpent qui rejoint le Petit Prince au milieu des rugissements des moteurs ?
La chose la plus exacte au sujet du Dakar, c’est son nom. Le Dakar est un raid, une incursion rapide dans le territoire de l’autre, pour le voler et le laisser plus pauvre qu’avant. Le petit film montrant Elmer Symons mort étendu à côté de sa moto et les débris de celle-ci est passé en boucle à la télévision. Le Dakar ne respecte même pas ses participants.
Verdure dans les dunes près de Tazzarine
3 Comments
bonjour
le dakar a été etil n’est plus
le fric s’en est melé
le show biz y fait sa promo
que vive les berbers ,le desert
je parlais courament le « sleu(excuse pour l’orthographe) et je parle toujours assez bien le marocain (de midelt)
c’est mon patois a moi le français deraciné
dans mon blog reparler de ce « temps »c’est parler du bonheur
salut
j’était un passioner de dakar j’ai meme ete voir des etapes marocaines mais j’etait la le jour de l’accident du pilote sud afriquain et j’ai ete horifier quant j’ai demander sont sentiment a un pilote d’un gros 4×4 nissan et qu’il ma répondu « c’est la loi du dakar » mes cheuveux se sont drésser sur ma tete et je croi que maintenant il faut laisser la nature et les pays propre et méssieux laisser vos grosse mécanique au garage il y a d’autre moyen de visiter des pays
Oui Mathamanche, je crois qu’on peut être passionné de sport automobile, je le comprends même très bien.
Mais tu as bien ressenti l’esprit très « égoïste » de cette course… merci pour ton témoignage
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